Cela fait six mois que Abderrahmane vit dans les Alpes, au nord de l’Italie, dans un ancien hôtel à
gestion familiale, reconverti en centre d’accueil momentané pour demandeur d’asile. Dans la
chambre en face de la sienne, vit Laly. Abderrahmane attend de passer devant une commission qui
statuera sur sa demande d’asile. Il est prévenu : en vue de ce procès, il va falloir qu’il raconte son
histoire détaillée. Laly est passé deux fois devant la commission, bientôt il aura la réponse de l’Italie,
de l’Europe. « Au nom du peuple italien », il devra partir. Laly ne le sait pas encore, mais bientôt il
traversera les frontières et ses montagnes géantes où l’on entend jaillir parfois un cri strident : une
élégie, laquelle traverse les territoires disloqués de la migration, ceux qui séparent le sud du nord, le
ciel de la terre. Et dans cette histoire de l’œil si humaine, apparaît en arrière-plan, la tragédie du sol
originaire, celle de la Pangée ou de la séparation.